Nouvelle attaque aérienne éthiopienne contre Makalé, la capitale de la région du Tigré

Mercredi 20 octobre, pour la deuxième fois cette semaine, l’armée éthiopienne a lancé une attaque aérienne contre Makalé, la capitale de la région septentrionale du Tigré, marquant une nouvelle escalade de ce conflit qui dure depuis près d’un an. Le 4 novembre 2020, le premier ministre Abiy Ahmed avait envoyé l’armée fédérale dans la région, après des mois de tensions, pour en chasser les autorités régionales dissidentes issues du Front de libération du peuple du Tigré (TPLF), qui a exercé le pouvoir en Ethiopie jusqu’en 2018.

Contrairement aux frappes de lundi – les premières sur Makalé rapportées depuis le début du conflit –, le gouvernement a rapidement confirmé l’information, d’abord donnée par des sources humanitaires et un habitant. Le raid « a visé des installations transformées [par les rebelles tigréens] en centre de fabrication d’armes et de réparation pour leur matériel militaire », a affirmé à l’AFP le porte-parole du gouvernement, Legesse Tulu.

Huit personnes ont été blessées, dont une femme enceinte, a indiqué le docteur Hayelom Kebede, de l’hôpital Ayder, principal établissement de santé de Makalé. Le bombardement aérien a notamment détruit un site industriel, selon un habitant. « C’était très lourd et l’avion était très proche. L’ensemble du site a brûlé, on ne sait pas s’il y a des victimes mais toute l’entreprise est partie en fumée », a-t-il précisé.

Le porte-parole du gouvernement a par ailleurs fait état d’une nouvelle frappe, cette fois à l’ouest de Makalé. Elle visait « un centre d’entraînement et un dépôt d’artillerie lourde » dans la zone de Tembien, a affirmé à l’AFP, par SMS, Legesse Tulu.

« Supériorité numérique » et « contrôle du ciel »

Les Etats-Unis « condamnent l’escalade continue de la violence, qui met les civils en danger », a réagi Ned Price, le porte-parole du département d’Etat. L’ONU s’est dite inquiète après ces dernières violences, relevant notamment que selon les premières informations, des civils, dont des femmes et des enfants, figuraient parmi les blessés à Makalé. « Nous avons clairement exposé nos préoccupations sur l’impact de ces opérations sur les civils ainsi que sur la nécessité d’éviter toute opération offensive qui pourrait cibler des civils », a déclaré à des journalistes Farhan Haq, un porte-parole du secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres.

A LIRE AUSSI:   Violences en Éthiopie : les Oromo en quête "d'égalité et de justice"

Les frappes « semblent s’inscrire dans le cadre des efforts entrepris pour affaiblir la résistance armée au Tigré », alors que les forces du TPLF gagnent du terrain dans la région Amhara, au sud du Tigré, a déclaré William Davison, spécialiste de l’Ethiopie à l’International Crisis Group (ICG). « Outre la supériorité numérique, le contrôle du ciel est l’un des derniers secteurs dans lesquels le gouvernement fédéral conserve un avantage militaire », a-t-il ajouté. Depuis deux semaines, diverses sources rapportent les signes d’une nouvelle offensive d’Addis-Abeba contre les responsables tigréens.

Lundi, l’armée éthiopienne avait mené deux raids contre des positions du TPLF à Makalé. Selon le Bureau de coordination des affaires humanitaires de l’ONU (OCHA), au moins trois enfants avaient été tués. Dans un premier temps, le gouvernement avait qualifié de « mensonge total » les informations de sources humanitaires, diplomatiques et médicale faisant état de ces bombardements. Un média d’Etat avait ensuite confirmé l’information et affirmé que des frappes aériennes avaient visé des cibles du TPLF.

Au moins 2 millions de personnes déplacées

Un porte-parole du TPLF, Getachew Reda, a dénoncé le raid de mercredi, lancé selon lui contre une zone résidentielle de Makalé. « La réaction du gouvernement face à ses pertes dans le conflit actuel est de viser des civils à des centaines de kilomètres du champ de bataille », a-t-il ajouté sur Twitter. Un peu plus tard, il a revendiqué la prise par le TPLF d’au moins deux villes dans la région Amhara, plaçant « à portée d’artillerie » Kombolcha et Dessie, où des dizaines de milliers de civils avaient trouvé refuge devant l’avancée des rebelles depuis juillet. Le ministère éthiopien des affaires étrangères a accusé lundi le TPLF d’attaques de civils dans les régions Amhara et Afar.

A LIRE AUSSI:   Le télétravail peu répandu en Afrique

Au début du conflit, les forces fédérales avaient rapidement pris le contrôle de la majeure partie de la région, dont Makalé, tombée entre leurs mains fin novembre 2020. Mais en juin, le TPLF a repris l’essentiel du Tigré puis a poursuivi son offensive dans les régions voisines, accentuant une crise humanitaire qui frappe des centaines de milliers de personnes. Selon l’ONU, au moins 2 millions de personnes ont été déplacées par le conflit au Tigré et dans les régions voisines.

Source: Le Monde Afrique/ Mis en ligne: Lhi-Tshiess Makaya-Exaucée

Tribune d'Afrique

Read Previous

Pétrole – Tchad : ExxonMobil suspend un site de production face à la fronde des salariés

Read Next

Au Soudan, une journée de manifestation cruciale pour la transition démocratique