Human Rights Watch dénonce la xénophobie chronique en Afrique du Sud

Dans un rapport publié ce jeudi, l’ONG précise que, malgré le plan national pour protéger les étrangers, les autorités ne se contentent pour l’instant que « de mots ».

Etre étranger en Afrique du Sud, c’est vivre « dans la peur constante d’être pris pour cible », alerte Human Rights Watch dans un rapport publié jeudi 17 septembre, rappelant que l’expérience de la xénophobie est « routinière » dans ce pays.

En avril 2019 à Johannesburg, « je vendais des vêtements dans la rue quand neuf Sud-Africains sont arrivés avec des bâtons et des sjamboks » (fouets en cuir de rhinocéros), raconte un Congolais dans le document publié par l’ONG. « Ils frappaient les gens, criaient : “Les étrangers, rentrez chez vous ! On n’a pas besoin de vous ! Vous prenez nos boulots et notre argent !”. J’ai commencé à courir, mais j’ai été frappé et mes deux sacs de vêtements m’ont été pris. »

Keshia a 10 ans. Ses camarades de classe à Johannesburg ne cessent de lui rappeler qu’elle est une kwerekwere, une étrangère, l’insultent et la bousculent. Mais elle s’inquiète aussi pour ses parents, qui ont fui les violences au Sud-Kivu (RDC) : « Chaque fois qu’ils se font agresser, cela m’affecte, précise-t-elle. Nous sommes une famille, alors si l’un de nous souffre, on souffre tous. »

La xénophobie en Afrique du Sud reste très répandue, rappelle HRW, en dépit d’un plan d’action national annoncé en 2019 pour lutter contre « l’intolérance ». Dans l’économie la plus industrialisée du continent, les étrangers sont souvent accusés de voler le travail aux locaux, surtout dans les secteurs peu qualifiés.

Des morts par dizaines

En 2008, 62 personnes sont mortes dans des violences xénophobes, et 7 autres en 2015. En septembre 2019, des foules armées s’en étaient prises à des commerces tenus par des étrangers à Johannesburg, faisant 12 morts.

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« Les gens d’autres nationalités ont enduré vague après vague des violences xénophobes et vivent dans la peur constante d’être pris pour cible », résume Kristi Ueda, autrice du rapport de l’ONG, qui rassemble une cinquantaine de témoignages d’Africains et d’Asiatiques.Lire aussi  « Voilà l’impact de la pandémie » : Melville, quartier branché de Johannesburg déserté par les clients

La police opère aussi de manière discriminatoire, ciblant particulièrement les étrangers lorsqu’elle lance des raids contre la contrefaçon par exemple. Ou en détenant de façon abusive des étrangers, affirmant ensuite avoir perdu leurs papiers ou leurs affaires, souligne l’ONG, qui dénonce une culture « d’impunité » qui ne « fait qu’encourager » ces comportements.

HRW appelle le gouvernement à prendre « des mesures urgentes et concrètes » pour protéger les étrangers, estimant que le plan national se contente pour l’instant « de mots ». Le dernier recensement sud-africain, en 2011, estimait à 2,2 millions le nombre de personnes nées à l’étranger, soit moins de 5 % de la population à l’époque.

Source: Le Monde Afrique/Mis en ligne : Lhi-Tshiess Makaya-Exaucée

Tribune d'Afrique

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