En Ethiopie, seulement 10 % de l’aide humanitaire parvient jusqu’au Tigré, selon l’Usaid

Seule 10 % de l’aide humanitaire parvient actuellement au Tigré, où la famine menace des centaines de milliers de civils, a déploré mercredi 4 août, à Addis-Abeba, Samantha Power, la directrice de l’Agence américaine d’aide internationale (Usaid). Le Tigré se trouve depuis plusieurs mois au cœur d’une grave crise humanitaire, selon les Nations unies, alors que l’aide internationale peine à parvenir à cette région du nord de l’Ethiopie en raison de nombreux retards et obstacles administratifs.

« Entre mi-juillet et le 2 août, selon les Nations unies, ce qui était nécessaire c’était 1 500 camions [d’aide humanitaire] et le nombre de camions qui ont roulé et ont pu passer est de 153. C’est 10 % des besoins », a déclaré Mme Power lors d’une conférence de presse, soulignant que « l’accès reste profondément inquiétant »« Les routes doivent être sûres. Et ceci est donc un appel à toutes les parties à permettre un accès humanitaire sans entraves, a-t-elle ajouté. Nous ne voyons pas les changements que nous espérions. »

De son côté, le chef des opérations humanitaires des Nations unies, Martin Griffiths, a déclaré que pour répondre aux besoins sur le terrain, 100 camions devraient entrer au Tigré quotidiennement. Quelque 5,2 millions de personnes – soit plus de 90 % de la population du Tigré – vivent grâce à l’aide extérieure, selon l’ONU.

Nettoyage ethnique

Le Tigré a plongé dans la violence en novembre, lorsque le premier ministre Abiy Ahmed a envoyé l’armée dans la région pour destituer les autorités locales du Front de libération du peuple du Tigré (TPLF) à la suite, selon lui, de l’attaque de camps militaires par des forces tigréennes. Prix Nobel de la paix 2019, M. Abiy avait rapidement déclaré victoire après la prise par les soldats éthiopiens de la capitale tigréenne, Makalé, avec l’aide de l’Erythrée voisine.

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Les forces tigréennes ont néanmoins continué leur lutte et repris Makalé et plusieurs autres villes du Tigré en juin. Après un cessez-le-feu décrété par Abiy Ahmed et le retrait des soldats éthiopiens, les forces tigréennes ont poursuivi leur offensive vers les régions voisines Amhara et Afar. Des centaines de milliers de personnes ont été déplacées par ces hostilités.

Mme Power a appelé les autorités tigréennes à « retirer immédiatement leurs forces » des régions Amhara et Afar. « Pour que l’aide parvienne à tous ceux qui en ont besoin au Tigré, alors TOUTES les parties doivent cesser les hostilités, a-t-elle tweeté mardi soir. Il n’y a pas de solution militaire à ce conflit. » Mme Power a réitéré la demande de Washington de voir les forces amhara se retirer de l’ouest du Tigré, tout comme les forces érythréennes venues soutenir l’armée éthiopienne.

If aid is to reach people in need in #Tigray, then ALL parties must end hostilities. There is no military solution to this conflict. 1/3— PowerUSAID (@Samantha Power)

Les Etats-Unis voient l’Ethiopie comme un partenaire essentiel dans la région instable de la Corne de l’Afrique, mais l’administration Biden a ouvertement critiqué la guerre au Tigré. En mars, le secrétaire d’Etat américain, Antony Blinken, avait dénoncé des actes de nettoyage ethnique dans l’ouest du Tigré. Et en mai, il a annoncé des restrictions de visa pour les responsables éthiopiens et érythréens accusés d’alimenter le conflit.

Deux ONG suspendues

Selon le premier ministre éthiopien, le cessez-le-feu décrété en juin avait pour but de faciliter l’acheminement de l’aide humanitaire, mais les ONG affirment que l’accès est plus difficile que jamais. La situation a encore empiré cette semaine lorsque le gouvernement de M. Abiy a suspendu deux ONG présentes au Tigré, les accusant de « désinformation ».

Médecins sans frontières (MSF) et le Conseil norvégien pour les réfugiés (NRC) « répandent la désinformation dans les médias sociaux et sur d’autres plateformes, en dehors du mandat et des objectifs pour lesquels ces organisations ont été autorisées à opérer », ont affirmé mercredi les autorités éthiopiennes.

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Une décision condamnée par Washington, l’ambassadrice des Etats-Unis à l’ONU jugeant cette suspension « inacceptable »« Je connais bien le travail de MSF et du NRC, et ils sont respectés au niveau international. L’Ethiopie doit reconsidérer cette décision », a déclaré Linda Thomas-Greenfield sur Twitter.

This suspension is unacceptable. I know the work of @MSF and @NRC_Norway well, and they are internationally respect… https://t.co/QcajSz9TYQ— USAmbUN (@Ambassador Linda Thomas-Greenfield)

Jan Egeland, secrétaire général du NRC, a régulièrement lancé sur Twitter des avertissements sévères sur la crise, comme en février : « En quarante ans de travail humanitaire, j’ai rarement vu autant d’entraves à l’acheminement de l’aide. »

Source : Le Monde Afrique/Mis en ligne : Lhi-Tshiess Makaya-Exaucée

Tribune d'Afrique

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