Au Kenya, la Cour suprême examine une révision constitutionnelle controversée

La Cour suprême du Kenya a commencé, mardi 18 janvier, à examiner un projet de révision constitutionnelle controversé, au cœur du jeu politique depuis plusieurs années dans ce pays d’Afrique de l’Est qui tiendra le 9 août ses élections présidentielle et législatives.

Le gouvernement a fait appel devant la plus haute juridiction du pays de deux décisions de justice qui ont bloqué ce texte qui prévoit de modifier le régime présidentiel actuel.

Baptisée Building Bridges Initiative (BBI), cette révision prévoit notamment de créer de nouveaux postes dans l’exécutif (un premier ministre, deux vice-premiers ministres, un leader de l’opposition) et d’augmenter le nombre de parlementaires de 290 à 360.

Selon le président sortant Uhuru Kenyatta, à l’origine de ce projet, cette ouverture du pouvoir permettrait de diluer la règle du « vainqueur rafle tout », qu’il considère comme la cause des conflits post-électoraux qu’a connus le Kenya.

Mais le texte, adopté par le Parlement en mai et qui devait être soumis à référendum, a été porté devant la justice par ses détracteurs.

Un tribunal, puis une cour d’appel ont jugé que le président n’avait pas constitutionnellement le droit d’initier un tel processus. La justice a également estimé que Kenyatta pouvait être poursuivi au civil pour avoir lancé illégalement ce processus.

Les audiences devant la Cour suprême sont prévues jusqu’à jeudi. Les juges feront alors connaître la date de leur décision.

Manœuvre

Selon des analystes, même si la Cour suprême donne raison au gouvernement et permet que le texte soit soumis à référendum, ce dernier ne pourra être organisé avant les élections prévues le 9 août. Mais depuis son lancement en 2018, le BBI a refaçonné le paysage politique kényan.

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Ses détracteurs estiment qu’il s’agit d’une manœuvre du chef de l’Etat, qui n’est pas autorisé à se présenter pour un troisième mandat, pour se maintenir au pouvoir en tant que futur premier ministre. Le texte concrétisait une trêve entre le président Kenyatta et l’opposant historique Raila Odinga après les violences post-électorales de 2017-2018.

Depuis son indépendance en 1963, le Kenya, qui ne compte pas moins de 45 communautés officielles, a plusieurs fois été en proie à des violences politico-ethniques après les élections, notamment après le scrutin de 2007 où plus de 1 100 personnes étaient mortes.

Raila Odinga, 77 ans, a annoncé en décembre 2021 qu’il se présenterait pour la cinquième fois à la présidence. Il est soutenu par des poids lourds du parti présidentiel.

Le vice-président William Ruto, 55 ans, que Kenyatta avait initialement adoubé pour lui succéder, a été progressivement mis à l’écart après le rapprochement opéré avec Odinga. En rupture publique avec Kenyatta, Ruto ne s’est pas officiellement déclaré candidat mais s’affiche, tenant des meetings tambour battant.

Il se pose en héraut des « débrouillards » du petit peuple face à l’alliance d’Odinga et Kenyatta, héritiers de deux dynasties politiques kényanes qui sont également issues des deux principales ethnies du pays, les Kikuyu (Kenyatta) et les Luo (Odinga).

Source: Le Monde Afrique/Mis en ligne: Lhi-Tshiess Makaya-Exaucée

Tribune d'Afrique

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