Absence de base constitutionnelle et de cadre juridique : Les élections libyennes du 24 décembre dans le doute

L’agenda des préparatifs des élections générales libyennes du 24 décembre, élaboré à Genève dans le cadre de l’accord politique, n’a pas été respecté. Les Libyens n’ont pas encore de base constitutionnelle ni de cadre juridique à ce rendez-vous électoral. Le litige politique apparent trouve ses origines dans le problème crucial du départ de toutes les troupes étrangères de Libye, groupes armés et forces régulières. La commission militaire 5+5 l’a annoncé depuis des mois. Mais, le dialogue politique et le gouvernement Dbeyba n’ont pas suivi. «Des franges libyennes, tirant encore profit de la révolution du 17 février 2011, ne veulent pas d’édification de l’Etat», explique le politologue Ezzeddine Aguil.

Craintes

Des affrontements armés n’ont cessé de se produire à Tripoli ces dernières semaines, créant des craintes autour de l’avenir du cessez-le-feu en Libye. Cette situation renvoie à la multiplication des centres de décision concernant les groupes armés dans l’Ouest libyen. Certains échappent à l’autorité du gouvernement de Abdelhamid Dbeyba. Les incidents armés survenus à l’aube du 3 septembre entrent dans ce cadre. «Le régiment 444 abrite des éléments qui n’appartiennent pas à l’armée», souligne le communiqué de la force d’élite, relevant de la Présidence du gouvernement, qui a cherché à mettre la main sur un dépôt de munitions «sous autorité illégale».

Tous les intervenants sur la scène libyenne sont conscients de ce sujet épineux. Certains groupes politiques, notamment les Frères musulmans et leur bras politique le Parti de la justice et de l’édification, essaient de justifier ces agissements sous l’étiquette de «protection des symboles de la révolution du 17 février». Néanmoins, «il est grand temps que l’autorité de l’Etat reprenne ses droits, afin de rétablir l’ordre constitutionnel», assure-t-on dans l’entourage de la ministre libyenne des Affaires étrangères, Najla Al Mangouche.

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Réagissant aux derniers incidents de l’aube du 3 septembre, l’ambassadeur américain en Libye, Richard Norton, a assuré que «les Libyens ne veulent pas voir resurgir le spectre de la guerre civile». Norton a ajouté que «le rétablissement de la stabilité passe impérativement par la tenue des élections en décembre, comme prévu». A cet effet, le responsable américain a assuré que «les dirigeants politiques de toutes les parties libyennes ont la responsabilité de se mettre immédiatement d’accord sur une solution de compromis qui permettra à cette échéance électorale de se tenir en temps voulu», notant que son pays «soutiendra ce processus». Aussi, Richard Norland a eu des entretiens avec des hauts responsables d’Egypte, de Turquie et du Maroc, du 10 au 16 août, où l’accent a été mis sur l’urgence d’une entente interlibyenne concernant la base constitutionnelle et le cadre juridique nécessaires aux élections. Néanmoins, il n’y a pas eu de percée tangible sur le terrain. Aucun accord n’a été signé entre les belligérants libyens, ni au niveau du Parlement ou celui du dialogue politique.

Audition du gouvernement

Au-delà des questions d’ordre politique, le gouvernement de Abdelhamid Dbeyba, en place depuis le 10 mars, rencontre des difficultés à réaliser les tâches pour lesquelles il a été mis en place, en rapport avec la vie courante des citoyens libyens. Pour évaluer les prestations de ce gouvernement, la Chambre des députés lui réservera demain une séance d’audition, dont l’ordre du jour portera, d’abord, sur les problèmes de rupture du courant électrique, souci majeur des Libyens. Le gouvernement sera également questionné sur la prise en charge de la pandémie de Covid-19, ainsi que la campagne de vaccination. Le problème de la liquidité financière continue à inquiéter les Libyens qui passent des heures devant les banques pour percevoir leur argent. Enfin, les questions de l’unification des établissements publics, l’abrogation du chapitre «imprévus» du Budget, ainsi que celui de la gestion de la dette selon les règles d’usage, sont soulevées par les députés.

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Le retard du gouvernement dans la réalisation de ses engagements inquiète l’opinion publique et les parlementaires. Certains observateurs vont jusqu’à accuser le gouvernement de vouloir prolonger indéfiniment son mandat, alors qu’il est prévu d’être limité à une année, y compris la période de transition avec le gouvernement désigné par les députés élus. Le gouvernement n’est, par ailleurs, pas parvenu à répondre à l’exigence de la commission militaire «5+5» de nommer un ministre de la Défense. Les questions qui fâchent, notamment l’affiliation des groupes armés de l’Ouest et le départ des forces armées étrangères, n’ont pas encore trouvé de réponses auprès des Libyens et risquent de prolonger davantage la transition.

Source : El Watan/Mis en ligne : Lhi-Tshiess Makaya-Exaucée

Tribune d'Afrique

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