Relance : la Commission économique pour l’Afrique prône l’innovation dans le financement du secteur privé

Vera Songwe, Secrétaire Exécutive de la Commission économique pour l’Afrique des Nations Unies. (Crédits : Flickr)

Dans son dernier rapport économique sur l’Afrique, la CEA estime qu’une relance économique pérenne passera par le développement des entreprises grâce au déploiement de financements innovants. Les gouvernements devront jouer un rôle important.

« Le secteur privé en Afrique est un puissant moteur pour la croissance économique et a le potentiel de faire passer les économies à faible revenu à un statut d’économies à revenu intermédiaire. Au niveau mondial, le secteur privé génère plus de 70% des emplois, invente, conçoit et produit la plupart des biens et services qui se traduisent par une valeur ajoutée et contribuent à plus de 80% des recettes publiques des pays à faible revenu et à revenu intermédiaire par le biais de l’impôt sur les sociétés et de l’impôt sur le revenu des salariés. Mais en Afrique, l’indisponibilité de financement a été identifiée comme l’obstacle le plus grave à la conduite des affaires ». C’est l’analyse que livre Vera Songwe, Secrétaire exécutive de la Commission économique pour l’Afrique (CEA) en préambule du rapport économique 2020 sur l’Afrique publié ce mardi 15 décembre par l’institution qu’elle dirige.

Intitulé : « Financements innovants pour le développement des entreprises en Afrique », ce rapport met en lumière la nécessité de pousser davantage dans les financements innovants pour ainsi doper la relance des entreprises qui assurerait une relance économique pérenne pour le continent. L’Afrique qui, rappelons-le, après avoir bâti de solide fondamentaux ces dernières décennies a été court-circuitée dans son élan par la pandémie de Covid-19, au point où le Sud du Sahara connaitrait en 2020 sa première précession en 25 ans. La CEA table sur une croissance du PIB du continent entre 1,8% et -4,1% cette année.

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Les entreprises ont en effet été considérablement mises à mal. Les exportateurs du continent ont dû essuyer des pertes considérables suite à la dégringolade des prix de plus de 2/3 des matières premières africaines : plus de -50% pour le pétrole, -20% pour les métaux, -26% pour le coton, -6% pour le cacao… Alors que ces entreprises sont majoritairement des PME, une enquête de l’Union africaine dévoilée le 9 décembre révélait que 95% des PME africaines n’auraient pas reçu d’appui gouvernemental pendant la crise sanitaire. Alors qu’avec les moratoires sur les crédits décidés en pleine crise, les entreprises vont devoir faire face à leur engagement tout en redémarrant leur exploitation, la charge peut s’avérer lourde.

5 pistes pour booster l’innovation dans le financement

Les experts de la CEA identifient cinq pistes pour renforcer l’innovation dans le financement des entreprises africaines. La première est celle d’un appui des gouvernements au secteur financier pour la mobilisation de financements à court terme -notamment bancaire- et de financement à long terme -notamment via les banques de développement au bénéfice des industries. Tout cela avec en toile de fond, des actions gouvernementales pour constituer un écosystème favorable au développement du secteur privé et ainsi porter les investissements à 35, voire 40% du PIB. La deuxième piste en appelle également à l’effort des Etats pour la création d’un cadre réglementaire propice au développement des entreprises de tout type via toute forme de financement. La CEA assimile la troisième piste à la Zone de libre-échange continentale africaine (Zlecaf) qui constituerait un marché de 1,7 milliard de consommateurs, représentant un PIB de plus de 2 500 milliards de dollars. Sa mise en œuvre favoriserait un développement accru des marchés financiers africains en permettant « une cotation croisée, une tarification efficace, une compétitivité accrue dans les chaînes de valeur régionales et mondiales et davantage de possibilités de financement innovant des entreprises ».

Les deux dernières pistes consistent en l’utilisation des ressources nationales en monnaie locale pour accroître le financement privé à long terme dont les investissements dans les infrastructures et le développement de la fintech pour fournir diverses alternatives de financement. L’une devrait approfondir les marchés des capitaux et augmenterait l’échelle des banques de développement, tandis que la dernière pourrait carrément révolutionner l’accès des entreprises au financement.

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Le nouveau rapport économique de la CEA montre donc que les gouvernements ont un rôle important à jouer dans le renforcement des financements innovants au bénéfice du secteur privé. L’étude prévoit que le secteur privé jouera un rôle important au cours de la décennie 2020-2023, en augmentant la prospérité économique à travers le continent et pour l’atteinte des objectifs de développement durable (ODD), pense qu’il faut impérativement tout mettre en œuvre pour accélérer et améliorer son accès au financement. L’institution salue les efforts dans ce sens de certains pays comme le Ghana, le Rwanda, la Côte d’Ivoire, le Burkina Faso ou la Mauritanie où des réformes engagées en collaboration avec leurs différents patronats ont permis d’améliorer l’accès des entreprises au financement innovant, notamment la fintech.

Par ailleurs, les experts de la CEA appellent notamment les banques, dont 60% des crédits au secteur privé est octroyé à court terme, à améliorer leurs offres pour permettre plus d’aisance aux entrepreneurs.

Source : La Tribune Afrique/Mis en ligne: Lhi-Tshiess Makaya-Exaucée

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