L’Uemoa et la Cédéao ont-elles le droit de continuer de sanctionner le Mali?

La Cour de justice de l’Uemoa a ordonné le 24 mars dernier la suspension des sanctions économiques qui frappent le Mali depuis début janvier. En attendant de se prononcer de manière définitive sur la légalité ou sur l’illégalité de ces sanctions, la Cour a jugé qu’il fallait les suspendre du fait de leurs graves conséquences sur l’État et le peuple malien. Mais deux semaines plus tard, cette décision n’a toujours pas été appliquée. Dans un communiqué diffusé jeudi 7 avril, le gouvernement malien de transition s’interroge sur cet « acharnement visant à asphyxier le peuple malien » et dénonce une violation des règles communautaires. Ces règles ont-elles réellement été bafouées ? Quel recours reste-t-il aux autorités maliennes ?

Un « déni de justice », voilà comment le gouvernement malien de transition qualifie le fait que ni les pays de l’Uemoa, ni ceux de la Cédéao, n’aient exécuté la décision de la Cour de justice de l’Uemoa. Cette non-application est-elle légale, ou viole-t-elle le droit ? Le Centrafricain Jean-François Akandji-Kombé est professeur à la Sorbonne, spécialiste de droit international et communautaire en Afrique.

« La Cédéao est une organisation distincte de l’Uemoa, donc la Cédéao n’est pas concernée. En revanche, pour l’Uemoa, il est dans l’ordre du droit que les organes et les États membres de l’Uemoa exécutent les décisions rendues par le juge de l’Uemoa. Donc c’est illégal, oui. »

Les chefs d’État de la Cédéao ont donc légalement le droit de faire ce choix purement politique : maintenir des sanctions destinées à faire plier Bamako dans le bras de fer qui se joue depuis des mois sur la durée de la prolongation de la transition au Mali.

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Mais pour les huit pays membres de l’Uemoa : quels moyens reste-t-il pour les contraindre, au moins eux, à suspendre les sanctions ? « Le problème, pratiquement, c’est que l’Uemoa n’a pas les moyens de faire exécuter par chacun des États membres de l’Uemoa les décisions de la Cour de justice, explique Jean-François Akandji-Kombé. Dans les faits, lorsque des décisions ne sont pas exécutées, il faut mobiliser la force publique. l’Uemoa n’a pas ce moyen-là. »

Sauf à lancer de nouvelles et longues procédures contre chacun des pays membres de l’Uemoa, Bamako n’a donc plus qu’à en appeler à la pression de l’Union africaine ou des Nations unies, pour obtenir gain de cause. C’est le sens du dernier communiqué publié le 7 avril par le gouvernement de transition. Mais compte tenu des tensions politico-diplomatiques actuelles, liées aux négociations en cours sur le retour à l’ordre constitutionnel et sur les nouveaux alliés russes de l’armée malienne, il est peu vraisemblable que cet appel soit entendu.

Source: RFI Afrique/Mis en ligne: Lhi-Tshiess Makaya-Exaucée

Tribune d'Afrique

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