L’Algérie vole au secours de l’économie tunisienne

La Tunisie a annoncé, mardi 14 décembre, avoir obtenu un prêt de 300 millions de dollars de l’Algérie, à la veille d’une visite officielle – à forte dimension économique – de deux jours du président algérien Abdelmadjid Tebboune à Tunis. Selon l’édition de mardi du Journal officiel de la République tunisienne, le président Kaïs Saïed a ratifié par décret un protocole financier, conclu le 9 décembre, relatif à l’octroi par l’Algérie à la Tunisie d’« un prêt d’un montant de 300 millions de dollars », soit 266,2 millions d’euros.

L’Algérie et la Tunisie souhaitent multiplier leurs échanges commerciaux limités pour l’instant à environ 1,2 milliard de dollars. « Sans l’épisode de sa maladie, le président algérien n’aurait pas attendu deux ans pour effectuer sa première visite à Tunis. Les relations entre les deux pays sont en effet excellentes sous les présidents Kaïs et Tebboune, élus à deux mois d’intervalle », informe le site algérien TSA. Et le média de préciser que « l’Algérie a affiché sa solidarité et sa disponibilité à aider la Tunisie dans trois épreuves que cette dernière a traversées pendant cette période : la crise économique, la pandémie de Covid-19 et la crise politique actuelle ». Cette visite intervient dans un contexte politique tendu de bras de fer entre Kaïs Saïed et ses détracteurs, et à quelques jours avant des manifestations prévues par ses opposants, mais aussi par ses partisans, le 17 décembre, jour de célébration du onzième anniversaire de la révolte qui a chassé du pouvoir Zine el-Abidine Ben Ali et donné le coup d’envoi du Printemps arabe.

Une crise économique sans précédent

La veille, la partie algérienne a tout de même informé sur l’axe fort qui sera donné à l’économie durant le séjour du président Tebboune. La Tunisie est confrontée à une grave crise économique avec une instabilité chronique freinant les ardeurs des investisseurs et des bailleurs de fonds. Au-delà des effets de la pandémie de Covid-19, la crise économique tunisienne, caractérisée par une croissance en berne depuis 10 ans (0,6 % par an en moyenne), la monnaie nationale qui a perdu plus de 8 % de sa valeur depuis le début de cette année par rapport au dollar, et une forte inflation de 6 % par an, a été aggravée par la pandémie qui a mis le pays à l’arrêt et l’a privé de cruciales recettes touristiques. Pour sortir de l’ornière, à côté des aides reçues notamment de l’Union européenne, Tunis se tourne pour la quatrième fois en 10 ans vers le FMI, dont elle espère obtenir avant la fin de l’année un prêt de près de 4 milliards de dollars (3,3 milliards d’euros). L’institution a annoncé le 18 novembre avoir reçu « récemment » une demande d’aide du nouveau gouvernement tunisien et que des discussions techniques étaient en cours pour « définir les priorités économiques » du pays.

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En octobre, un responsable de la Banque centrale de Tunisie avait indiqué que son pays était en discussion avec les Émirats arabes unis et l’Arabie saoudite pour renflouer les caisses de l’État, mais aucune annonce sur l’avancement de ces tractations n’a été faite depuis. En outre, Kaïs Saïed a reçu le soutien des Émirats et de l’Arabie saoudite, deux pays en première ligne de la lutte contre l’islam politique – dont Ennahdha est l’émanation en Tunisie. En février 2020, le dirigeant algérien avait déjà annoncé un dépôt de 150 millions de dollars à la Banque centrale tunisienne (BCT), à titre de garantie, et accordé des facilitations pour le paiement par la Tunisie de ses achats de carburants et de gaz algériens. La Tunisie s’approvisionne en gaz naturel de l’Algérie, qui est son premier fournisseur.

Un contexte politique tendu

Le pays traverse également une grave crise politique cet été quand le président Saïed s’est arrogé les pleins pouvoirs avec le limogeage du gouvernement et la suspension du Parlement dominé par le parti d’inspiration islamiste Ennahdha. Kaïs Saïed a annoncé, lundi, le prolongement de cette suspension jusqu’à la tenue de nouvelles élections en décembre 2022.

Le discours présidentiel a suscité des réactions mitigées dans la rue. « C’est important de mettre les choses sur la voie constitutionnelle et juridique, et de les lier à un calendrier. Mais concernant les sujets actuels comme l’emploi, la pauvreté, la marginalisation et la poursuite en justice de ceux qui ont commis des crimes contre le pays, son discours en est encore loin », a confié à l’AFP Nizar ben Ahmida, un professeur de 37 ans.

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Le chef de la puissante centrale syndicale tunisienne (UGTT) Noureddine Taboubi a relevé devant la presse que le discours de Kaïs Saïed était « dépourvu de vision pour les orientations économiques et sociales ». Et d’ajouter : « Nous avons soutenu ses annonces du 25 juillet, mais nous ne lui avons pas donné un chèque en blanc. »

Source: Le Point Afrique/ Mis en ligne: Lhi-Tshiess Makaya-Exaucée

Tribune d'Afrique

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