La Chine a annoncé jeudi qu’elle nommerait un envoyé spécial pour favoriser la paix dans la turbulente Corne de l’Afrique et qu’elle souhaitait se concentrer sur le continent pour faire du commerce sur les infrastructures.
Le ministre des Affaires étrangères Wang Yi a fait ces commentaires au Kenya, qui participe activement aux efforts diplomatiques visant à mettre fin à la guerre en Éthiopie depuis fin 2020 entre le Front populaire de libération du Tigré (TPLF) et le gouvernement fédéral du Premier ministre Abiy Ahmed.
Il s’est également rendu en Érythrée, qui borde la région nord du Tigré et a été un allié d’Abiy dans un conflit qui a tué des milliers de personnes, déraciné des centaines de milliers et semé la faim.
« Pour partager le consensus politique et coordonner les actions, la Chine nommera un envoyé spécial du ministère chinois des Affaires étrangères pour la Corne de l’Afrique », a déclaré Wang lors d’une conférence de presse dans la ville portuaire de Mombasa, via un interprète.
Les pays de la Corne de l’Afrique devraient décider de leur propre destin et convoquer une conférence de paix, a ajouté M. Wang. L’autre guerre majeure de la région se déroule en Somalie, où les militants islamistes al Shabaab se battent contre un gouvernement soutenu par l’Occident.
La Chine s’est traditionnellement davantage concentrée sur le développement économique et le commerce en Afrique que sur la politique et la diplomatie, et Wang n’a donné aucun autre détail sur le rôle de l’envoyé.
Pékin veut aider à développer le littoral érythréen de la mer Rouge, a-t-il ajouté, sans s’étendre non plus là-dessus.
Eric Olander, rédacteur en chef du site Web et du podcast The China Africa Project, a estimé que la visite en Érythrée était stratégique dans la rivalité de la Chine avec les États-Unis, qui a sanctionné l’Érythrée pour son rôle au Tigré.
« Cela fait partie d’un grand effort pour rallier les pays contre l’utilisation de sanctions », a-t-il déclaré. « Je pense qu’ils (la Chine) sentent qu’ils gagnent du terrain contre les États-Unis »
L’envoyé spécial américain pour la Corne de l’Afrique, Jeffrey Feltman, devait se rendre jeudi à Addis-Abeba, la capitale éthiopienne.
Feltman quittera son poste ce mois-ci après plus de neuf mois en poste, et David Satterfield, l’ambassadeur américain sortant en Turquie, prendra ses fonctions, a rapporté mercredi Reuters.
AVOCAT ET VACCINS
Les autorités chinoises ont signé six accords avec leurs homologues kenyans, dont un autorisant les agriculteurs kenyans à exporter des avocats frais vers la Chine. Cela permettra au Kenya de réduire son déséquilibre commercial considérable avec la Chine, a déclaré Rachel Omamo, ministre des Affaires étrangères du Kenya.
Le Kenya recevra un don de 10 millions de doses de vaccin COVID-19 de la Chine, ont indiqué les deux parties, faisant partie d’ un milliard de doses supplémentaires promises à l’Afrique par la Chine à la fin de l’année dernière.
La Chine est passée de l’offre de prêts d’infrastructure aux pays africains à l’augmentation du commerce. « Il ne s’agit jamais de ce que la Chine veut faire, mais de ce que l’Afrique veut faire », a-t-il déclaré.
Les besoins du continent augmentaient avec la construction de routes et de voies ferrées, a déclaré Wang, citant le besoin de vaccins et d’opportunités d’exportation.
Les analystes ont également attribué le ralentissement des prêts d’infrastructure chinois en Afrique aux problèmes économiques de la Chine et à un effondrement des prix des matières premières qui a compliqué le service de la dette africaine.
Les intérêts de la Chine dans la Corne incluent sa base navale à Djibouti, surplombant une route maritime mondiale clé. Pékin a accordé d’importants prêts à l’Éthiopie enclavée, qui dépend du port de Djibouti pour le commerce.
La région est également menacée par l’instabilité au Soudan du Sud, où la Chine a d’importants investissements pétroliers, et par les retombées de la Somalie qui ont entraîné des attaques meurtrières au Kenya voisin.
Après le Kenya, Wang devait se rendre aux Comores, un archipel de l’océan Indien. « Ils (la Chine) voient l’océan Indien comme un espace contesté, c’est donc une priorité », a déclaré Olander. « Wang se rendre simplement dans un petit pays comme les Comores est symbolique en soi. »
Source: Reuters Afrique/ Mis en ligne: Lhi-Tshiess Makaya-Exaucée
