Génocide au Rwanda : le parquet requiert un non-lieu pour les officiers français

Deux soldats français a camp de réfugiés tutsi de Nyarushishi, le 30 avril 1994. PASCAL GUYOT / AFP

Le parquet de Paris a requis un non-lieu, lundi, pour les cinq officiers généraux de l’armée française visés par une enquête pour génocide et complicité de crimes contre l’humanité au Rwanda lors de l’opération Turquoise. La décision finale revient désormais aux juges d’instruction.

Non-lieu général dans l’enquête sur l’inaction reprochée à l’armée française lors de massacres de Bisesero fin juin 1994, pendant le génocide des Tutsi au Rwanda, a appris lundi 3 mai l’AFP de sources proches du dossier. La décision finale revient désormais aux juges d’instruction.

Les cinq officiers généraux de l’opération Turquoise visés par l’enquête n’ayant pas été mis en examen, les magistrats devraient logiquement ordonner un non-lieu, à moins qu’ils ne décident de relancer les investigations, comme réclamé récemment par des associations et des rescapés après la publication du rapport Duclert sur le rôle de la France au Rwanda.

Le parquet de Paris annonce dans un communiqué avoir requis un non-lieu en faveur des militaires français de la force Turquoise — ils avaient été placés sous le statut de témoins assistés par les juges — mis en cause pour leur attitude durant le génocide des Tutsis du Rwanda. pic.twitter.com/I6NDq1ot2a— Fabrice Arfi (@fabricearfi) May 3, 2021

« Navrant et affligeant »

Le parquet de Paris a considéré que n’a été « établie aucune aide ou assistance des forces militaires françaises lors de la commission d’exactions, aucune adhésion de ces dernières au projet criminel poursuivi par les forces génocidaires ni aucune abstention d’intervenir face à des crimes constitutifs d’un génocide ou de crimes contre l’humanité en vertu d’un accord antérieur », a expliqué le procureur de Paris Rémy Heitz dans un communiqué. 

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Au terme de ses réquisitions de 386 pages, dont l’AFP a eu connaissance, le parquet n’écarte pas la possibilité que la non-intervention des militaires soient constitutives d’une « non-assistance à personne en péril », mais conclut que cet éventuel délit est quoiqu’il en soit prescrit.

« Ce réquisitoire est navrant et affligeant juridiquement », a déclaré Eric Plouvier, l’avocat de Survie, dénonçant « un déni de justice ». 

Depuis 2005, les associations Survie, Ibuka, Fidh et six rescapés de Bisesero accusent la force Turquoise, déployée au Rwanda sous mandat de l’ONU pour faire cesser les massacres, d’avoir sciemment abandonné aux génocidaires pendant trois jours des centaines de Tutsi réfugiés dans les collines de Bisesero, dans l’ouest du pays.

« Des charges nouvelles »

Selon l’ONU, les massacres ont fait plus de 800 000 morts entre avril et juillet 1994, essentiellement au sein de la minorité tutsi.

Pendant l’instruction, cinq hauts-gradés français – dont le chef de Turquoise, le général Jean-Claude Lafourcade – ont été entendus par les juges et sont restés placés sous le statut de témoin assisté, moins incriminant que celui de mis en examen qui ouvre, lui, la voie à un éventuel procès.

Un choix contesté par les parties civiles qui réclament un procès en « complicité de génocide » contre ces officiers mais aussi contre l’entourage, jamais visé par l’enquête, de l’ancien président François Mitterrand.

Pour les plaignants, le rapport publié en mars par la commission présidée par l’historien Vincent Duclert, sur la politique française au Rwanda entre 1990 et 1994, a révélé « des charges nouvelles » qui justifient de relancer l’enquête et d’auditionner enfin des hauts-responsables de l’Élysée de l’époque.  

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Source: France 24/Mis en ligne : Lhi-Tshiess Makaya-Exaucée

Tribune d'Afrique

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