Football : la confédération africaine séduite par l’idée d’une Coupe du monde tous les deux ans

Pour Mohamed Magassouba, l’affaire est d’ores et déjà tranchée : bientôt, la Coupe du monde de football aura lieu tous les deux ans. « Je ne vois pas comment cela ne pourrait pas se faire. La FIFA veut que ce projet aboutisse et il semble être à un stade avancé », estime le sélectionneur des Aigles du Mali, alors que la Fédération internationale de football (FIFA) milite activement depuis plusieurs mois pour une refonte du calendrier de la compétition reine.

Après une étude de faisabilité lancée en mai et des entretiens avec les acteurs du football mondial, la proposition doit être discutée le 21 décembre lors d’un sommet réunissant en visioconférence les 211 fédérations nationales membres de la FIFA. L’objectif de Gianni Infantino, président de l’organisation : basculer dès 2028 sur un Mondial biennal.

Deux confédérations, l’UEFA (Europe) et la Conmebol (Amérique du Sud), ont déjà affiché leur hostilité au projet. Une étude indépendante commandée par l’UEFA a révélé que les fédérations européennes perdraient 3 milliards d’euros sur quatre ans si la Coupe du monde devenait biennale. A l’inverse, l’AFC (Asie) et la Concacaf (Amérique centrale, Amérique du Nord et Caraïbes) sont favorables à l’idée. L’Océanie ne s’est pas encore exprimée. Quant à la Confédération africaine de football (CAF), elle se dit plutôt séduite et ouverte à la discussion.

« Un risque de banalisation »

L’Afrique pourrait-elle jouer les arbitres ? Avec 54 fédérations, le continent pèse d’un poids certain, notamment dans l’élection du président de la FIFA, la prochaine étant programmée en 2023. Lors du vote sur une biennalisation de la Coupe du monde, les voix africaines, cumulées à celles de l’Asie et de la Concacaf, pourraient être déterminantes.

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En juillet, à l’issue d’une réunion du comité exécutif de la CAF à Rabat, Patrice Motsepe, le président sud-africain de l’instance, avait déclaré que « l’Afrique pourrait être la plus grande bénéficiaire d’une Coupe du monde tous les deux ans », avant d’ajouter dans un communiqué publié deux mois plus tard qu’il était « important de poursuivre les discussions et les négociations ».

Une position proche de celle de Fouzi Lekjaa, président de la fédération marocaine, vice-président de la CAF et membre du conseil de la FIFA, très proche de Gianni Infantino. Dans un entretien accordé au site marocain 360sport en août, il a affiché un soutien franc et massif à la réforme du Mondial. « Cela donnerait davantage d’opportunités aux équipes africaines de progresser en affrontant les meilleures sélections du monde, et permettrait aux joueurs africains les plus talentueux de briller », a-t-il assuré.

Michel Dussuyer, le sélectionneur français du Bénin, avoue être plus « partagé » sur la question. « Une Coupe du monde tous les deux ans, c’est casser un mythe, estime-t-il. Il y a pour certains un risque de banalisation de l’événement. Et le calendrier international est déjà très chargé. Mais pour des équipes comme le Bénin, cela augmenterait les chances de se qualifier, avec une phase finale tous les deux ans », argumente le technicien.

Entre 50 et 60 matchs par saison

Au Mali, Mohamed Magassouba admet que certains de ses joueurs sont sensibles à l’hypothèse, tout en mesurant les inconvénients. « Disputer une telle compétition, c’est évidemment positif pour le palmarès, pour l’expérience, note le technicien. Mais ils savent aussi que cela va augmenter les cadences, déjà élevées, et s’inquiètent des conséquences de l’accumulation de matchs pour leur corps, et donc des risques de blessures. »

Qu’ils évoluent en Afrique, en Europe ou en Asie, les joueurs doivent enchaîner compétitions domestiques (championnats et coupes), compétitions continentales de clubs et rencontres des sélections nationales. Cela peut représenter, pour certains, entre 50 et 60 matchs par saison. Pour alléger ce calendrier, le Français Arsène Wenger, directeur du développement du football mondial à la FIFA, propose de réformer le système des qualifications.

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A l’heure actuelle, chaque confédération choisit son propre format. Pour la Coupe du monde 2022, l’Afrique a ainsi opté pour un tour préliminaire (matchs aller-retour) réunissant les 28 sélections les plus faibles, un deuxième tour pendant lequel 40 formations s’affrontent, puis un troisième d’où cinq équipes sortent qualifiées pour la phase finale au Qatar. Cela représente, pour se qualifier, huit matchs au minimum et dix au maximum.

Arsène Wenger veut réduire le nombre de rencontres pour les équipes de tous les continents ; et celles-ci seraient jouées sur deux dates (octobre et mars), contre cinq actuellement.

« Cela va faire des mécontents »

Cet argument interpelle le Suisse Raoul Savoy, sélectionneur de la Centrafrique : « Certes, avec un système de qualifications moins long et difficile, cela offrirait plus de chances à certaines petites équipes de jouer une Coupe du monde. Mais en Afrique, la sélection nationale représente beaucoup en termes de passion, de lien social. Si les Africains ne voient leur équipe que deux fois par an, contre cinq fois en ce moment, cela va faire des mécontents. Les supporteurs ont envie de regarder jouer les internationaux évoluant à l’étranger. Les Sénégalais voudront voir Sadio Mané et les Egyptiens Mohamed Salah plus souvent. »

Quoi qu’il en soit, la FIFA souhaite avancer rapidement sur ce projet. Le calendrier international a été planifié jusqu’en 2024 et la Coupe du monde 2026 se jouera pour la première fois avec 48 équipes, dont neuf ou dix issues du continent africain.

Avec une compétition biennale, les sommes engrangées par la FIFA, dont 90 % des ressources dérivent des revenus de la Coupe du monde, connaîtraient une augmentation substantielle. Cela profiterait également aux fédérations, lesquelles verraient les dotations versées par l’instance s’accroître mécaniquement. Un argument auquel de nombreuses fédérations africaines, moins aisées que d’autres, sont sensibles.

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Source: Le Monde Afrique/ Mis en ligne: Lhi-Tshiess Makaya-Exaucée

Tribune d'Afrique

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