Confiance, transparence et innovations pour une relation commerciale durable en Afrique

Guy Mountonga et Rodrigue Bodo, associés fondateurs de SafeTrade 101. (Crédits : DR.)

La relation entre les TPE-PME et leurs partenaires est la clé de voûte de nos économies. Avant toute chose, cette relation doit se fonder sur la confiance. Pour garantir celle-ci, nous avons besoin d’outils à même d’apporter transparence et fiabilité à la relation commerciale et financière. Plus que des enjeux de conformité, la transparence et la fiabilité deviennent des objectifs éthiques et des valeurs essentielles à défendre.

Les entreprises étrangères, notamment les TPE-PME, vont de plus en plus à la conquête du marché africain, en dépit d’un risque politique parfois élevé et un environnement des affaires souvent difficile. Depuis plusieurs années, nous constatons une augmentation des demandes de garanties vers la région, en particulier en direction du Maghreb et de l’Afrique francophone subsaharienne. Le risque pays diffère selon les régions, tant les pays africains sont loin de tous présenter les mêmes spécificités politiques monétaires et économiques. Il s’agit là d’un paramètre à considérer avant toute prospection commerciale, car cela peut nuire aux efforts de l’investisseur étranger. L’accès à l’information financière et la transparence y demeurent compliqués : les entreprises d’une manière générale n’ont pas d’obligation de publication de leurs états financiers, et beaucoup de pays ne disposent pas de bases de données consolidées. La fiabilité des chiffres publiés est souvent sujette à caution, de même que leur authentification. En outre, les tribunaux de commerce dans plusieurs pays ont été créés que récemment (Guinée Équatoriale en 2015, Sénégal en 2017), et le droit des procédures collectives est peu utilisé.

La confiance et la transparence, accélérateurs de croissance pour les TPE-PME

Dans le contexte d’un financement, la confiance implique l’échange d’informations claires entre l’institution et l’emprunteur – ou entre le fournisseur et son client. Cette confiance devient alors vectrice d’une prise de conscience des opportunités en termes de business. Au-delà de la nécessite de conformité du Know Your Customer (KYC) imposée aux grands comptes et aux organismes financiers, avec pour enjeu une meilleure connaissance de leurs clients. Allant plus loin que le simple KYC, il s’agit surtout de développer un Customer Intimacy. Ce concept incarne, en plus d’une relation de confiance, l’accompagnement des partenaires. Il s’agit d’instaurer une relation équilibrée et consentie, où chacun trouve le plaisir de travailler ensemble.

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Le caractère intime de la relation avec ses partenaires économiques s’appuie avant tout sur des valeurs de fiabilité, de solidarité et de durabilité. Ainsi seulement permettra-t-elle le développement d’une relation pérenne et stable entre l’acheteur et le vendeur ou l’emprunteur et le prêteur. Les clients se transformeront alors en ambassadeurs, augmentant le taux de rétention et le potentiel des ventes. Les TPE-PME ont donc tout à gagner à jouer le jeu d’une transparence, encore une fois consentie, et basée sur le désir de construire des relations durables et responsables avec leurs partenaires.

Face aux difficultés de financement et donc de survie auxquelles font face tant d’entreprises en Afrique, gouvernance et fiabilité de l’information financière sont devenues des enjeux majeurs. Et pour cause : les zones géographiques les plus difficiles au monde pour les entreprises se trouvent encore en grande partie sur le continent. Selon le dernier classement Doing Business de la Banque mondiale, seuls deux pays d’Afrique subsaharienne (Maurice, Rwanda) figurent parmi les 50 premiers pays où il est le plus facile de faire des affaires, tandis que de nombreux pays parmi les 20 derniers sont issus de la région. Même si des avancées notables comme la mise en place d’un guichet unique et l’adoption du Code des investissements sont à saluer, il est crucial d’aller plus loin.

Nous sommes convaincus que pour avoir de la confiance il faut de la transparence ! Si la collecte et l’interprétation des données financières génèrent des coûts de traitement qui souvent ne sont pas en adéquation avec le résultat escompté, le recours au scoring, sur fond de machine learning ou d’intelligence artificielle (IA), est apparu comme une alternative solide permettant de collecter et de traiter les informations sur les TPE-PME en un temps record et à bas coût. Si le scoring reste un outil redoutable pour l’aide à la décision de crédit, son efficacité dépend de la disponibilité des informations sur lesquelles il s’appuie. Cependant, il ne répondrait que partiellement au besoin de confiance et de fiabilité, pour ce qui concerne la population de TPE-PME, du fait de la qualité des informations financières aussi bien dans les pays développés que dans les pays émergents.

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L’innovation technologique, un moteur de la mise en place d’un écosystème de confiance

Certaines agences de « crédit bureau » mettent en avant la taille de leur base de données plutôt que la qualité des informations qui y sont sauvegardées. Cependant, cette vision Big Data ne permet pas une compréhension fine des enjeux financiers des entreprises, notamment lorsqu’il s’agit de TPE-PME. Dans un contexte où le continent africain incarne à la fois des opportunités d’affaires et aussi plus d’incertitudes qu’ailleurs, la relation commerciale avec les acteurs africains exige de disposer d’informations à jour, tant macro-économiques, micro-économiques ou monétaires. Très souvent un seul partenaire actif sur le terrain peut y apporter la sécurité nécessaire, mais aussi la compréhension préalable de la situation pour orienter la démarche commerciale vers des pays et des entreprises présentant un risque maîtrisable. Une autre alternative s’offre alors aux grands comptes et aux organismes de financement: s’appuyer sur l’innovation technologique, au travers des plateformes digitales.

Celles-ci permettent de collecter l’information directement à la source – donc auprès de leur portefeuille de TPE-PME. Ces plateformes permettent de définir sur mesure le type d’informations recherchées et la fréquence de leur mise à jour. Leurs fonctionnalités intègrent aussi la collecte d’informations diverses et variées. En plus des données financières, ces plateformes permettent en effet de rassembler des éléments sur l’activité extra-financière du partenaire. Par leur agilité, elles facilitent le flux d’information dans le cadre de la mise en place d’un processus de Customer Intimacy. Cet accès aux données doit être pris en compte dans les accords commerciaux entre les organismes financiers, les clients et leurs fournisseurs ; au même titre que le prix ou les conditions de paiement. Ce principe de partage d’informations sur la base du volontariat permet alors aux petites entreprises un partage ciblé et maîtrisé de leurs informations. En plus de cette transparence contrôlée, ces plateformes offrent aux TPE-PME une véritable tribune leur permettant de communiquer sur leur image en racontant l’histoire autour de leurs chiffres.

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L’avenir de la transparence ne repose donc plus seulement sur la Big Data. Le Self-Service Data se présente aujourd’hui comme une alternative de choix, permettant aux parties prenantes une entente réciproque et qualitative basée sur le partage d’informations et de données. Cet échange est la véritable clé pour garantir des relations durables !

Source : La Tribune Afrique/Mis en ligne : Lhi-Tshiess Makaya-Exaucée

Tribune d'Afrique

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