Arrestation de Nabil Karoui : Entre instrumentalisation du pouvoir judiciaire et manipulation des médias

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Le candidat à la présidentielle en Tunisie, Nabil Karoui, a été incarcéré, vendredi dernier, à la prison de Mornaguia. Plusieurs partis politiques et candidats à la présidentielle ont appelé à mettre le pouvoir judiciaire à l’abri de toute instrumentalisation politique et des querelles électorales.

D’autres ont applaudi la décision de la justice. La direction du parti Qalb Tounes, dirigé par Nabil Karoui, a accusé le chef du gouvernement, Youssef Chahed, et ses complices «d’être derrière l’arrestation de leur leader», lors d’une conférence de presse, tenue samedi, ainsi que sur les plateaux de Nessma TV et El Hiwar Ettounsi. Le mouvement islamiste Ennahdha a publié une déclaration invitant toutes les parties concernées à apporter les clarifications nécessaires concernant le respect des procédures dans l’affaire des frères Karoui.

Accusations

Le dirigeant de Qalb Tounes, Yadh Elloumi, ne mâche pas ses mots, accusant le chef du gouvernement tunisien et l’alliance au pouvoir d’être derrière «les manœuvres fomentées contre le candidat à la présidentielle, Nabil Karoui, président du parti». Elloumi considère que «Nabil Karoui est le premier détenu politique après la révolution», estimant que son arrestation constitue une affaire politique par excellence. Elloumi s’est félicité, dans ce contexte, du soutien exprimé par plusieurs concurrents au scrutin présidentiel et, notamment, Abdelfattah Mourou, Hatem Boulabyar et Abdelkrim Zbidi. Au fait, les trois candidats ont publié des positions appelant à épargner les procédures judiciaires des tiraillements politiques, pour préserver l’intégrité du processus électoral.

Pour sa part, le conseil des secrétaires généraux du Front populaire a mis en garde contre les conséquences de l’instrumentalisation de la justice, des appareils de la sécurité et des moyens de l’Etat pour régler les conflits politiques sous le couvert de la lutte contre la corruption. De son côté, l’instance exécutive de Afek Tounes a appelé le gouvernement à éviter l’instrumentalisation du pouvoir dans les querelles électorales dans le but d’écarter les adversaires, invitant le chef du gouvernement, Youssef Chahed, candidat à la présidentielle, à respecter l’Etat de droit et des institutions et à trancher les affaires importantes loin de toute forme sélective.

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Quant au candidat d’Ettakatol à l’élection présidentielle, Elyes Fakhfakh, il a estimé que le pouvoir exécutif se doit de faire preuve de transparence et d’éviter toute suspicion d’instrumentalisation des moyens de l’Etat pour écarter les adversaires politiques. Pour lui, tous les citoyens doivent bénéficier du principe d’égalité devant la justice. Il s’agit également, soutient-il, de lutter contre l’impunité pour tout contrevenant.

Manipulation

L’arrestation de Karoui a suscité l’indignation au motif que la justice s’est laissée manipuler par le politique, rappelant aux Tunisiens un passé récent d’élimination de concurrents gênants, en se jouant de procédures judiciaires. Toutefois, il demeure concevable de voir autrement les choses. En effet, l’individu arrêté, le candidat à la présidentielle, Nabil Karoui, est sous le coup d’accusations graves et, si l’on en croit les sondages, pourrait se retrouver au poste de président de la République.

La fonction lui permettrait alors de se mettre a l’abri des poursuites, alors même que des éléments probants l’accableraient. Sachant par ailleurs qu’en tant que candidat, il a lui même agi au mépris des règles de l’équité, en mettant à son propre service, la machine médiatique dont il dispose, la chaîne Nessma TV, et qu’il a également investi l’action humanitaire, mais, pour en détourner le sens et pour l’assujettir à ses intérêts politiques. Il y a donc un véritable problème.

Par ailleurs, Me Faycal Jadlaoui, l’avocat de l’homme d’affaires Chafik Jarraya, arrêté depuis mai 2017 pour «atteinte à la sûreté de l’Etat», a évoqué, vendredi soir sur la chaîne Nessma TV, qu’une unité spécialisée de la Sécurité nationale a rendu visite à son client et lui a proposé un arrangement s’il leur remet des dossiers impliquant Nabil Karoui et Hafedh Caïd Essebsi. «Du pur mensonge», réplique le ministère de l’Intérieur dans un communiqué, où il appelle le ministère public à ouvrir une enquête.

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La direction générale des prisons et de la rééducation relevant du ministère de la Justice a nié, elle-aussi, l’entrée en contact avec Chafik Jarraya de n’importe quelle équipe de sécurité ou de renseignements, depuis le 27 mars 2019, quand il a été officiellement auditionné à la prison de la Mornaguia. «Cela entre dans le cadre de l’approche de ‘terrorisme médiatique’, prôné par Nabil Karoui contre ses accusateurs de l’association ‘I Watch’», explique le ministre-conseiller Lazhar Akermi.

Il rappelle le contenu de la vidéo, où Karoui appelle son team à débiter des trucs genre «agents des Etats-Unis, collaborateurs de la CIA, athées, corrompus, etc.», contre les membres d’I Watch, à l’adresse de leurs familles et voisins. Nabil Karoui appelle l’approche «terrorisme médiatique» et conseille à son team de s’excuser après avoir mis tout, sens dessus dessous. Me Jadlaoui et l’équipe Com de Nabil Karoui utilisent cette tactique de mensonge avéré, exploitant deux supports médiatiques, Nessma TV et Al Hiwar Ettounsi. Dur pour la Tunisie.

Source: El Watan/Mis en ligne :Lhi-tshiess Makaya-exaucée

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