Tunisie : Marge de manœuvre étroite pour Elyes Fakhfakh

Le chef du gouvernement tunisien, Elyes Fakhfakh, est surtout attendu sur les dossiers du chômage et de l’économie

Elyes Fakhfakh n’a certes pas cessé de dire, dans toutes ses interventions publiques, devant l’Assemblée et ailleurs, qu’il ne dispose pas de baguette magique pour faire face à la crise socioéconomique secouant la Tunisie. Néanmoins, il s’est attribué la légitimité populaire du résident Saïed et il a promis de tourner la page des échecs successifs des anciens gouvernants. Fakhfakh n’a spécifiquement rien promis. Il s’est limité à dire que la Tunisie nécessite un nouveau logiciel et qu’il va faire changer les choses dans le bon sens, selon les termes de son talisman de logiciel.

Le nouveau chef du gouvernement sait que l’économie est asphyxiée, même si elle commence à faire sortir sa tête de l’eau, en matière d’inflation, de contre-valeur du dinar et de balance commerciale. Fakhfakh s’est néanmoins identifié à la légitimité populaire du chef de l’Etat, Kaïs Saïed.

Il a combattu les islamistes d’Ennahdha pour limiter sa majorité aux partis ayant soutenu le président Saïed au deuxième tour des présidentielles. Le nouveau gouvernement est donc censé réaliser les espoirs créés par le Président, surtout que ce dernier est intervenu, en personne, pour imposer cette formule gouvernementale, en brandissant des élections anticipées si Fakhfakh ne passait pas. Le public attend donc les résultats tangibles, créés de cet élan.

Fakhfakh a insisté sur le besoin de réinstaller l’espoir parmi la population, ce qui constitue un véritable tremplin pour un redémarrage.

Toutefois, «le peuple n’a plus de potentiel pour attendre longtemps et subir davantage de sacrifices, meurtri qu’il est, et affecté par des années successives de crise socioéconomique», réplique Mustapha Ben Ahmed, le président du bloc parlementaire de Tahya Tounes. Ce dernier propose plutôt de s’éloigner des slogans utopiques et de dire la vérité, pour éviter une rapide déception. Le député conclut que c’est à Fakhfakh d’assumer ses choix.

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Priorités

Devant l’Assemblée des représentants du peuple, Fakhfakh a parlé de huit grands chantiers pour installer les bases d’un nouveau modèle de développement, en passant d’une économie à bas coûts à une économie à haute valeur ajoutée. Pour y parvenir, le nouveau chef du gouvernement a mis comme première priorité, le respect de la loi et la lutte contre toutes les formes de violence et de terrorisme. En 2e position, il a placé la lutte contre la cherté de la vie et toutes les formes de contrebande. Il a cité, ensuite, la redynamisation de l’économie, la lutte contre la corruption et la mobilisation des ressources pour le Budget 2020. Les trois derniers chantiers concernent l’enseignement, la santé et l’économie numérique.

Les observateurs et les politologues sont unanimes pour dire que ces huit priorités constituent plus des slogans qu’un véritable programme, du moment qu’elles ne sont nullement chiffrées ni quantifiées. L’équipe Fakhfakh était plutôt occupée à négocier les conditions de son passage à l’ARP, plus que son programme d’actions.

Le passage à l’action ne serait pas facile, de l’avis même des partis de la majorité gouvernementale, surtout Ennahdha et Tahya Tounes, qui constituaient l’épine dorsale du gouvernement Chahed. «Peut-on vraiment faire des changements radicaux avec les mêmes composantes ?» s’interroge le député de Qalb Tounes, Oussama Khelifi, dont le parti n’a pas voté la confiance à Fakhfakh.

Ce dernier ne voulait pas de Nabil Karoui et son parti, Qalb Tounes, dans sa majorité. Fakhfakh s’est donc retrouvé avec les islamistes d’Ennahdha, sur six ministères et Tahya Tounes, sur deux ministères, constituant les principales composantes partisanes du gouvernement. Il n’y a, côté partisan, qu’Ettayar et Echaab, comme nouveaux partis soutenant le gouvernement. Mais, il y a, aussi, 16 ministres indépendants. Néanmoins, l’équation n’a vraiment pas radicalement changé. Les perspectives de réussite du gouvernement Fakhfakh restent tributaires de sa capacité, lui et le président Saïed, à convaincre les Tunisiens à reprendre la voie du travail, comme ne cesse d’appeler Mehdi Jemaa, l’ex-chef de gouvernement en 2014. Autrement, ce ne sera pas évident. 

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Source: El Watan/Mis en ligne: Lhi-tshiess Makaya-exaucée

Tribune d'Afrique

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