Il sera vendredi devant l’Assemblée tunisienne pour un vote de confiance : Premier test de vérité pour le gouvernement Jamli

Tunisian President Kais Saied meets with Prime Minister designate Habib Jemli in Tunis, Tunisia, in this handout pictured obtained by Reuters on November 15, 2019. Tunisian Presidency/Handout via REUTERS THIS IMAGE HAS BEEN SUPPLIED BY A THIRD PARTY. NO RESALES. NO ARCHIVES – RC2UBD9VX1VG

La confusion règne dans le paysage politique, à quatre jours de la séance du vote de confiance pour le gouvernement Jamli, prévue vendredi prochain.

Tous les partis politiques se disent insatisfaits de la composition, même les islamistes d’Ennahdha, qui ont nominé Habib Jamli. La choura d’Ennahdha, réunie hier, a toutefois décidé de voter la confiance à Jamli. Les islamistes appellent les partis à «modérer» leurs exigences, pour l’intérêt de la Tunisie. Le gouvernement Jamli a besoin de 109 voix pour passer vendredi prochain à l’Assemblée des représentants du peuple (ARP). Le bloc d’Ennahdha dispose de 54 sièges. Les islamistes ont donc besoin de 55 autres voix, voire plus, parce qu’il y a toujours des députés absents. La moyenne des présences, lors des votes importants, ne dépasse pas 195 députés, sur les 217.

Ghannouchi peut compter sur Nabil Karoui et les 38 députés de Qalb Tounes, comme lors de son élection à la tête de l’ARP. Le bloc Karama (21 députés), formé par les mécontents d’Ennahdha, a également voté pour Ghannouchi. Toutefois, Seifeddine Makhlouf, le président du bloc, ne cesse d’affirmer qu’il ne va pas voter pour le gouvernement Jamli, contenant des personnalités proches de Qalb Tounes. Et si Nabil Karoui revient régulièrement à de meilleurs sentiments, malgré les déclarations du président de la choura d’Ennahdha, Abdelkarim Harouni, sur le refus des islamistes de s’allier aux corrompus, ce n’est pas le cas de Seifeddine Makhlouf.

Bouée de sauvetage

En effet, le député, dirigeant de Qalb Tounes, Yaad Elloumi, a déclaré aux médias, après une réunion du bureau exécutif du parti, «qu’il y a de réelles compétences au sein de cette composition gouvernementale, et nous ne voyons pas de couleur politique nette en son sein, en faveur d’un parti déterminé». Elloumi a loué l’action menée par Habib Jamli, qui a «réussi à nouer des contacts avec tous les partis politiques, y compris son parti» et «mis l’accent sur la question de la lutte contre la pauvreté, l’un des points auxquels Qalb Tounes attache une grande importance». Le parti de Nabil Karoui offre, régulièrement, la bouée de sauvetage à Ennahdha, bien que les deux partis nient, chacun de son côté, l’existence de connexion entre eux.

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«La réalité, c’est que Qalb Tounes est disposé à tout faire, pourvu que la justice ne réexamine pas les dossiers de Nabil Karoui et le renvoie en prison», souligne Mustapha Ben Ahmed, le président du bloc parlementaire du parti Tahya Tounes du chef de gouvernement sortant, Youssef Chahed. Ghannouchi a fixé à vendredi la réunion du vote de confiance, pour disposer du temps nécessaire pour négocier avec le bloc Karama et le bloc de la réforme (15 députés), quitte à changer la composition du gouvernement. La Constitution permet à Jamli de changer son équipe avant le vote. Mais tout changement doit passer par le président de la République avant d’atterrir à l’ARP. Ghannouchi compte également rallier quelques députés indépendants.

Pour ce qui est des autres blocs parlementaires, ils ont déjà annoncé qu’ils n’accorderont pas la confiance au gouvernement. C’est le cas du bloc démocratique, disposant de 44 sièges, et formé, essentiellement, par Ettayar et Echaab. Même refus du côté du Parti destourien libre (17 sièges) et de Tahya Tounes (14 sièges). La Constitution prévoit qu’au cas où l’ARP n’accorde pas sa confiance au candidat, c’est le président de la République qui nommera la personnalité qu’il juge en mesure de former le gouvernement. Laquelle personnalité dispose de 10 jours pour obtenir la confiance de l’ARP. Autrement, le Président dissout l’ARP et appelle à des législatives anticipées.

Economie en berne

Mais, au-delà de cette impasse politique, somme toute solvable d’une manière ou d’une autre, la Tunisie souffre économiquement et traverse une crise financière, qui pourrait s’aggraver si le pétrole flambe. Le budget de l’Etat 2020 a besoin de 11,2 milliards de dinars (3,5 milliards d’euros), à solliciter sur le marché intérieur (20%) et auprès des institutions financières et du marché financier (80%), sous la condition de reconquérir la confiance du FMI, de la Banque mondiale et autres bailleurs de fonds, ce qui n’est guère assuré, surtout que le signal fort d’un engagement politique puissant autour d’un gouvernement investi de la confiance de l’ARP à une large majorité tarde à venir.

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L’atomisation du Parlement et les querelles partisanes ne favorisent pas un vote massif et prioritaire en faveur de grandes lois structurantes. Quelle que soit la compétence des nouveaux gouvernants, le déficit budgétaire sera, comme celui du commerce extérieur et l’aggravation du chômage, au cœur d’une problématique complexe. L’accroissement de l’inflation et l’érosion de la croissance ne feront que plomber davantage une économie sous perfusion. C’est-à-dire flambée des prix, contraction de l’investissement, fragilisation des finances publiques et autres périls. Le salut de la Tunisie n’est, semble-t-il, pas pour demain.       

Source: El Watan/Mis en ligne: Lhi-tshiess Makaya-exaucée

Tribune d'Afrique

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