Crise libyenne : Pourquoi Lamamra n’a pas remplacé Salamé

Sauf retournement de situation, l’ancien ministre algérien des Affaires étrangères, Ramtane Lamamra, ne sera pas le prochain envoyé spécial du secrétaire général de l’ONU en Libye.

La raison ? Sa désignation à ce poste se serait heurtée à l’opposition de la Maison-Blanche. Les Etats-Unis seraient même les seuls parmi l’ensemble des membres du Conseil de sécurité de l’ONU à émettre des réserves concernant la personne de Ramtane Lamamra. C’est en tout cas la version que soutient le quotidien américain The Hill.

Diplomate chevronné, Ramtane Lamamra avait pourtant été choisi et soutenu par Antonio Guterres en personne pour remplacer Ghassan Salamé, qui avait démissionné début mars pour, avait-il dit, des raisons de santé. Tout le monde reconnaît son professionnalisme et sa grande maîtrise des dossiers africains. Alors pourquoi cette opposition américaine, surtout que Washington ne considère pas la Libye comme faisant partie de ses priorités ?

The Hill précise qu’en réalité l’administration américaine n’a fait que satisfaire aux doléances des Emirats arabes unis et de l’Egypte, qui lui ont fait comprendre qu’ils ne voulaient pas voir l’ancien commissaire à la paix et à la sécurité de l’Union africaine prendre en main le dossier de la crise libyenne. Il faut dire que les Américains se méfient aussi un peu de Lamamra qu’ils perçoivent comme un «anti-impérialiste» et un diplomate tenace. Mais iraient-ils jusqu’à lui barrer la route pour un poste d’envoyé spécial pour sa ténacité ? «Tout est possible», estime un diplomate algérien.

En revanche, l’intense lobbying mené par les Emirats arabes unis à Washington pour disqualifier la candidature de Ramtane Lamamra étonne beaucoup plus, dans la mesure où ce pays entretient de bonnes relations avec l’Algérie. Les indiscrétions du quotidien américain contredisent ainsi certains médias ayant pourtant pignon sur rue qui avaient soutenu, au début du mois, que les Emirats arabes unis et la France avaient œuvré en coulisse pour que le diplomate algérien succède à Ghassan Salamé. Les Emiratis auraient-ils donc joué double jeu dans ce dossier ?

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Rien n’est à exclure. Abou Dhabi, dont tout le monde sait qu’il est l’un des principaux soutiens militaires et financiers de Khalifa Haftar, a pu effectivement décider en cours de route de lâcher Lamamra. Les Emiratis ont pu en effet préférer en dernier ressort appuyer la désignation d’un envoyé spécial en Libye malléable et acquis à leur cause.

Le constat vaut aussi pour l’Egypte qui considère la Libye comme faisant partie de sa sphère d’influence. Une sphère sur laquelle lorgne aussi l’Algérie, du moment que la Libye fait partie de l’Union du Maghreb arabe. «Un diplomate aussi impartial et professionnel que Lamamra aurait pu remettre en cause les intérêts des Emiratis. C’est pourquoi ils ont fini par changer de fusil d’épaule», estime une source qui connaît bien la mentalité des dirigeants des monarchies arabes du Golfe.

Dans le cas du dossier libyen, Ramtane Lamamra a pu aussi être la cible de «tirs amis». En d’autres termes, soutient une source bien informée, des cercles en Algérie auraient bien pu également s’opposer à sa promotion en qualité d’envoyé spécial de l’ONU en Libye. Pourquoi ? Il faut croire que l’ancien ministre des Affaires étrangères suscite encore la jalousie, surtout qu’il a la stature d’un homme d’Etat.

Et certains ne veulent visiblement pas qu’il réapparaisse sur les écrans radars de peur de le voir revenir aux affaires. Les jalousies sont d’ailleurs telles que certains se sont mis, aussitôt son départ du ministère des Affaires étrangères, à détricoter son œuvre, y compris l’accord de paix au Mali. Un accord obtenu pourtant après d’âpres et coûteuses négociations. Donc il n’est pas du tout impossible qu’on ait insisté auprès des Emiratis à partir d’Alger pour qu’on bloque à tout prix Ramtane Lamamra.

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Source: El Watan /Mis en Ligne: Lhi-Tshiess Makaya-Exaucée

Tribune d'Afrique

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